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Les commissaires aux droits de l’homme et les médiateurs veulent mettre fin à la VBG endémique et multidimensionnelle

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Un appel a été lancé à tout le monde de se mettre au travail, afin de juguler la violence basée sur le genre (VBG), désormais décrite comme un phénomène endémique et multidimensionnel aux effets dévastateurs sur les femmes, les hommes, les garçons et les filles dans la région de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC).

Mme Habiba Roswana Osman, Directrice générale de la Commission des droits de l’homme du Malawi (CDH), a lancé cet appel dans un discours liminaire qu’elle a prononcé à l’occasion d’une réunion consultative organisée par le Forum parlementaire de la SADC (FP-SADC). La réunion virtuelle visait à permettre aux commissaires aux droits de l’homme et aux médiateurs d’examiner le projet de Loi-type de la SADC sur la VBG, élaboré par le Forum en collaboration avec ses partenaires.

Mme Osman a indiqué que la VBG continuait d’être une menace à la sécurité humaine, à la paix et au développement, ainsi que à la réalisation des projets de développement nationaux, régionaux et internationaux. Elle a ajouté que la VBG avait également des conséquences socio-économiques dramatiques.

“La VBG reste la plus grave violation des droits de l’homme en Afrique australe, étant donné qu’une femme sur deux en a été victime à un moment donné de sa vie au monde”, a-t-elle observé.

Elle a noté que dans la région de la SADC, certains pays présentaient des cas de VBG plus élevés que d’autres et que le COVID-19 a exacerbé la discrimination et les inégalités structurelles auxquelles sont confrontées les femmes et les filles.

Elle a ajouté que des viols conjugaux avaient également été signalés dans certains pays et que la VBG avait coûté au moins 1,7 milliard de rands au Gouvernement sud-africain.

“Au niveau mondial, les données continuent de montrer que la VBG reste un problème grave et omniprésent dans tous les secteurs”, a-t-elle déclaré.

Soulignant qu’aucun secteur n’était à l’abri de la VBG, Mme Osman a déclaré que ce fléau avait un impact négatif sur le produit intérieur brut de certains pays et portait atteinte à la santé, à la vie, à l’indépendance financière, à la productivité et à l’efficacité.

Elle a noté que la SADC avait adopté divers cadres pour lutter contre la VBG de manière coordonnée. À cet égard, elle a cité le Plan indicatif régional de développement stratégique révisé (2015-2020) et a exprimé son optimisme quant au fait que la Loi-type de la SADC sur la VBG guiderait les États membres dans la transposition, la ratification et la mise en oeuvre des directives et obligations internationales et régionales pertinentes qui éclairent la prévention et les réponses à la VBG.

Elle a encouragé toutes les parties prenantes à promouvoir énergiquement la Loi-type sur la VBG afin de soutenir les droits de l’homme pour tous et de veiller à ce que personne ne soit laissé de côté.

S’exprimant à la même occasion, l’honorable Professeur Oagile Key Dingake, juge renommé, a souligné que la VBG privait les gens de leurs droits fondamentaux.

“Lorsque nous parlons des droits, nous désignons les droits non négociables qui ne nous sont pas accordés à la merci de l’État. En réalité, l’État, en tant que détenteur d’obligations, est tenu de veiller à la réalisation de ces droits. La VBG compromet un grand nombre de différents droits contenus dans nos constitutions et nos lois dans les pays de la SADC”, a-t-il indiqué.

Le juge Dingake a présenté deux documents connexes. L’un portait sur la VBG, en tant que question de droits de l’homme, et l’autre donnait un aperçu des lacunes contenues dans la législation sur la VBG dans la région de la SADC.

Le juge a dit : “Le droit à la vie et le droit à la dignité constituent, à mon avis, la base fondatrice de tous les autres droits. Tous les autres droits doivent découler des droits fondamentaux : le droit à la vie, le droit à la dignité humaine, la sécurité de la personne, l’autonomie et l’autodétermination. La VBG est l’une des violations des droits de l’homme les plus répandues dans le monde. Elle ne connaît aucune barrière sociale ou économique. Elle ne fait pas de distinction sur base de la classe sociale. Elle touche plus particulièrement les femmes et les filles.”

Il s’est dit préoccupé par le fait que dans certaines parties de la région de la SADC, la culture est utilisée comme excuse ou justification pour opprimer les femmes et les filles.

Il a souligné que certaines pratiques culturelles allaient à l’encontre des droits de l’homme et que certains rôles assignés aux femmes et aux filles limitaient leurs options et restreignaient leur autonomie. Le juge a dit que la VBG avait de nombreuses répercussions négatives sur les survivants. Il s’agit notamment de blessures physiques et psychologiques.

Il a expliqué que si les blessures physiques étaient manifestes, par contre, les blessures psychologiques, qui comprennent la dépression, l’anxiété, les troubles alimentaires, le stress et des comportements compulsifs, étaient difficiles à détecter.

Le juge s’est également dit préoccupé par le nombre peu des signalements de la VBG et des poursuites judiciaires réussies à l’endroit des contrevenants. Il a néanmoins exprimé son optimisme quant au fait que l’éducation continue pourrait socialiser les garçons et les filles de manière à ce qu’ils adhèrent aux valeurs d’égalité et des droits de l’homme pour un monde meilleur.

En ce qui concerne les lacunes et les omissions dans la législation sur la VBG dans la région de la SADC, le juge a indiqué que le Protocole de la SADC sur le Genre et le développement visait à promouvoir l’égalité des sexes dans toute la région. Il a noté que la partie 6 dudit protocole exigeait que les États promulguent, d’ici 2015 (il y a sept ans), des lois susceptibles de lutter contre la VBG et veillent à l’application de ces lois, afin que les auteurs de VBG soient traduits en justice.

Il a toutefois déclaré que la situation actuelle dans la région montrait que la législation sur la VBG s’est améliorée, mais que la mise à disposition de lieux sûrs pour les victimes de VBG et le renvoi entre prestataires de services “restent un défi”.

Le juge a expliqué : “Onze États membres de la SADC disposent de lois sur la VBG. Treize États membres ont une législation sur les agressions sexuelles. À l’exception de l’Angola, tous les États membres de la SADC ont des lois sur le harcèlement, contre deux États seulement en 2009. Actuellement, tous les États membres de la SADC disposent de lois sur la traite des personnes, contre trois États seulement en 2009, à savoir le Madagascar, le Mozambique et la Zambie. Par contre, tous les États membres proposent une forme de services aux survivants de la VBG ; ce qui est louable.”

Il a toutefois précisé qu’il existait des lacunes. Notamment, les cadres juridiques de 12 États membres sont toujours discriminatoires à l’égard des femmes. L’assistance juridique aux femmes victimes de VBG est encore limitée. Il a souligné qu’à moins de rendre l’accès aux services juridiques possible et facile pour les femmes, de nombreuses réponses juridiques seraient considérées comme déficientes.

Il a noté qu’il était également très préoccupant qu’un grand nombre d’États membres disposent de lois qui rendent extrêmement difficile l’obtention d’un avortement. Ceci entraîne de nombreux avortements non sécurisés et des taux de mortalité élevés, lesquels portent atteinte au droit à la vie.

Sur une note encourageante, le juge a indiqué que le harcèlement sexuel était interdit dans la majorité des Etats membres de la SADC. En ce qui concerne le mariage des enfants, la criminalisation de ce genre de mariage n’était en place que dans quatre Etats membres.

“Les 12 autres États membres de la SADC n’ont pas de législation relative au mariage des enfants”, a-t-il déclaré. Cependant, il a félicité les pays qui ont criminalisé le mariage des enfants, comme le Mozambique et le Zimbabwe.

Le juge Dingake a observé que la faible transposition des lois internationales ratifiées avait fait perdre à de nombreux États membres des opportunités d’enrichir leurs propres lois. Par conséquent, ils n’ont pas pu combler les lacunes et n’ont donc pas réussi à éliminer les inégalités.

S’exprimant à la même occasion, Mme Boemo Sekgoma, Secrétaire générale du FP-SADC, a déclaré que la Loi-type de la SADC sur la VBG était conforme au Plan stratégique du Forum pour la période 2019-2023.

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“Le Plan stratégique du Forum consacre la nécessité pour la région de la SADC de parvenir à l’égalité des sexes et d’adopter une culture de respect des droits de l’homme qui comprennent le droit à l’intégrité physique, le droit à la santé et le droit à la vie. Les droits de l’homme sont donc au coeur du débat sur la VBG”, a-t-elle déclaré.

Elle a dit que la consultation des représentants des Commissions des droits de l’homme ou des médiateurs avait été prévue en reconnaissance du rôle central qu’ils jouent en tant que praticiens des droits de l’homme.

Elle les a implorés d’aider le Forum à intégrer pleinement la perspective des droits de l’homme dans la Loi-type sur la VBG.

Notant que la VBG entraînait des “violations importantes des droits de l’homme”, la Secrétaire générale a souligné que l’État, en tant que détenteur d’obligations, était tenu “d’adopter une législation appropriée ou de prendre les mesures nécessaires pour protéger ses citoyens, qui sont titulaires de droits, contre la VBG et d’autres formes de traitement inhumain ou dégradant”.

Elle a souligné que la Loi-type de la SADC sur la VBG était également conforme à la stratégie régionale plus large de la SADC et au cadre d’actions pour lutter contre la VBG, tel qu’illustré dans le programme pour 2018-2030. Par conséquent, elle a préconisé des dispositions législatives conformes aux droits de l’homme et interdisant les pratiques traditionnelles, sociales, économiques et politiques négatives qui favorisent toutes les formes de VBG.

“Avec la Loi-type de la SADC sur le VIH et le mariage des enfants, la Loi-type sur la VBG vise à donner un tableau complet en ce qui concerne la prise en compte des problèmes de droits de l’homme qui affectent les femmes et les filles dans la région de la SADC”, a déclaré la Secrétaire générale.

Mme Stella Twea, de la Commission des droits de l’homme du Malawi, a salué la Loi-type sur la VBG ; mais elle a préconisé la sensibilisation des femmes et des filles ayant des connaissances sur les droits, afin qu’elles puissent revendiquer le respect de leurs droits.

Elle a déclaré : “La plupart d’entre elles ne cherchent même pas à obtenir justice parce qu’elles ne savent pas où s’adresser. Donc, l’une des activités que nous allons vraiment entreprendre est de nous assurer que nous augmentions cette sensibilisation en termes de connaissances juridiques dans nos pays et de nous assurer que les survivants puissent réellement aller chercher la justice.”

Au cours de la consultation, une femme du Malawi qui avait été abusée sexuellement à plusieurs reprises par son beau-père jusqu’à ce qu’elle tombe enceinte, a partagé son calvaire. Son histoire a non seulement mis un visage humain sur la VBG, mais a également souligné le fait que, dans certains cas, les auteurs de VBG étaient proches de leurs victimes.

Le Dr Linda Naidoo, de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), a déclaré qu’une réponse efficace à la VBG devait être centrée sur la victime, garantir la responsabilité du délinquant et être fondée sur les droits de l’homme.

« Ces orientations sont bien intégrées dans le projet de Loi-type sur la VBG. En outre, le projet envisage des réponses aux situations d’urgence telles que la pandémie actuelle de COVID-19 », a-t-elle déclaré.

Elle a toutefois déclaré que la Loi-type “doit être appropriée par les États membres et devenir un document vivant”.

Elle a ajouté : « Elle exige en outre que les États membres priorisent la VBG, qu’ils intègrent dans leur législation nationale tout instrument pertinent, régional et international, relatif aux droits de l’homme, qu’ils réforment et/ou alignent leur législation nationale sur la Loi-type et qu’ils allouent les ressources nécessaires à cette fin ».

Elle a mis au défi les commissaires aux droits de l’homme et les médiateurs de fournir aux institutions des droits de l’homme une orientation stratégique et de prendre des décisions stratégiques sur les questions de droits de l’homme.

“Je vous mets au défi aujourd’hui de veiller à ce que la VBG soit traitée comme une question de droits de l’homme et que la VBG soit une priorité dans les travaux des instituts nationaux des droits de l’homme. À ce titre, je vous invite également à envisager des mesures pratiques pour encourager les États membres à ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme en suspens, qui sont essentiels à la prévention et à l’atténuation de la VBG”, a déclaré le Dr Naidoo.

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